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Arrêt No 42 du 24 Avril 1986 |
Arrêt No 42 du 24 Avril 1986
ODOULAMY Yaotcha Awodjigué c. AHEBA Antoine LORSQU'UN BAIL ARRIVE À EXPIRATION ET N'EST PAS RENOUVELÉ, LA REPRISE DU BIEN PAR SON PROPRIÉTAIRE DOIT SE FAIRE AUTOMATIQUEMENT QUAND BIEN MÊME LE LOCATAIRE A EU À EFFECTUER DES TRAVAUX DE CONSTRUCTION DONT LE MONTANT A ÉTÉ ENTIÈREMENT REMBOURSÉ PAR UNE PARTIE DES LOYERS DU CONTRAT INITIAL. LA RECONDUCTION TACITE N'AYANT PAS ÉTÉ ACCEPTÉE PAR LE PROPRIÉTAIRE C'EST ILLÉGALEMENT ET ABUSIVEMENT QUE LE LOCATAIRE SE MAINTIENT DANS LES LIEUX LOUÉS, CAUSANT AINSI UN PRÉJUDICE CERTAIN AU PROPRIÉTAIRE A QUI DES DOMMAGES- INTÉRÊTS DOIVENT ÊTRE ALLOUÉS. DOIT ÊTRE INFIRMÉ UN JUGEMENT QUI A DÉCIDÉ DU CONTRAIRE PAR MAUVAISE INTERPRÉTATION DES FAITS DE LA CAUSE. Président : DURAND Alexandre La Cour Attendu que le jugement du tribunal de première instance de cotonou a été prononcé le 20 Février 1985 ; Attendu que par cet acte d'appel en date du 18 Mars 1985 ODOULAMY Yaoïtcha a assigné son locataire à comparaître devant la Cour d'appel de Cotonou le 11 Avril 1985 ; Attendu que le délai d'appel de deux mois est respecté de même que le délai d'ajournement, il y a lieu de conclure à la recevabilité en la forme de l'acte d'appel interjeté par ODOULAMY ; Attendu que AHEBA Antoine a, le 1er Novembre 1984, assigné ODOULAMY son propriétaire à comparaître devant le Tribunal de Première Instance de Cotonou ; Attendu qu'il convient de revenir sur les faits pour rappeler qu'un contrat de bail est intervenu entre les parties le 31 Décembre 1977 ; Qu'en exécution dudit contrat, AHEBA a réalisé des travaux de construction dont le montant est remboursable par une partie des loyers ; Qu'au début de l'année 1980, un autre contrat est intervenu, qui annule le premier et permet à AHEBA de jouir de la construction jusqu'au 31 Juillet 1984, période couvrant la totalité de son investissement ; Que depuis Janvier 1980, AHEBA qui a transformé le local en maison d'habitation ne paie plus ses loyers, dit que son propriétaire refuse de les percevoir et le menace d'expulsion en multipliant les lettres de préavis de sortie et les actes de vandalisme ; Que le propriétaire a enlevé la toiture de son studio de photographie et a dû le remettre sur intervention du commissariat de Cadjehoun ; Attendu que le 1er Novembre 1984, sans attendre l'expiration, le 5 Novembre 1984, du nouveau préavis à lui donné par son propriétaire, AHEBA a assigné ODOULAMY à comparaître devant le Tribunal de Première Instance de cotonou aux fins de voir prononcer son maintien dans les lieux et de voir son propriétaire condamné à lui verser des dommages-intérêts ; Attendu que, par jugement en date du 20 Février 1985, le Tribunal de Première Instance de cotonou a fait droit à la demande de AHEBA Antoine ; Qu'appel est interjeté par ODOULAMY Yaoïtcha devant la Cour d'Appel de Cotonou ; SUR LE MAINTIEN DANS LES LIEUX Attendu que pour demander son maintien dans les lieux AHEBA Antoine fait état du contrat passé le 31 Décembre 1977 et qui expire en 1990, qu'il occulte le nouveau contrat passé en 1980 qui annule le premier et lui donne la jouissance de la construction jusqu'au 31 Juillet 1984 ; Attendu encore que AHEBA prétend que son propriétaire ne se plaint d'aucun défaut de paiement de loyers mais qu'au contraire, il les refuse ; Mais attendu que, conformément à la loi "les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites", qu'il y a lieu de reconnaître la validité du contrat passé en 1980 et d'en appliquer les clauses ; qu'en conséquence, on ne saurait maintenir AHEBA dans les lieux sans enfreindre la loi ; Attendu aussi que, le refus du propriétaire de recevoir les loyers n'exonère pas le locataire de son obligation principale ; Que AHEBA ne rapporte pas la preuve qu'il a agi en locataire diligent ; Attendu que le maintien dans les lieux de AHEBA est contraire à la loi ; SUR LES DOMMAGES-INTERETS DE AHEBA Attendu que AHEBA expose que, plusieurs années auparavant, le propriétaire a bouché et muré la porte et la fenêtre qui aèrent son studio de photographie et bloqué les lieux d'aisance (W. C.) le troublant ainsi dans l'exercice de sa profession, d'où une perte de clientèle qui lui cause préjudice ; Mais attendu que AHEBA ne rapporte pas la preuve de ces prétendus actes de Vandalisme perpétrés par ODOULAMY, ceux-ci ne peuvent être retenus comme voies de fait ouvrant droit à réparation ; Attendu, quant à l'arrachement de la toiture dont fait aussi état AHEBA, et qui a été constaté par le Commissariat de Cadjèhoun et reconnu par ODOULAMY lui-même, ceci est un acte qui est intervenu après l'expiration du bail et qui ne saurait être regardé comme étant préjudiciable à AHEBA Antoine lui-même ; Que fautif par le fait qu'il occupe illégalement les lieux depuis le 1er Août 1984 ; Qu'il s'ensuit que le moyen est irrecevable ; SUR LA DEMANDE D'EXPULSION Attendu que, pour demander l'expulsion de AHEBA Antoine, ODOULAMY invoque l'expiration du terme du contrat de bail passé en 1980 ; Attendu que la validité dudit contrat n'est pas contestable ; Que lorsqu'un bail arrive à expiration et n'est pas renouvelable, la reprise du bien par son propriétaire doit se faire automatiquement ; Attendu que c'est illégalement et abusivement que AHEBA Antoine occupe les lieux litigieux depuis le 1er Août 1984 ; Que le moyen est fondé et qu'il a lieu de faire droit à la demande de l'appelant ; SUR LES DOMMAGES-INTERETS DE ODOULAMY Attendu que ODOULAMY Yaoïtcha demande réparation des préjudices par lui subis sans apporter la preuve matérielle desdits préjudices ; Attendu qu'il est de principe que celui qui allègue un fait doit en rapporter la preuve ; Mais attendu que dans certains cas, le préjudice est présumé ; Qu'en l'espèce, la preuve du préjudice moral subi par ODOULAMY du fait de sa garde à vue arbitraire au Commissariat de Cadjehoun n'a pas à être rapportée, pas plus que la preuve du préjudice matériel subi par le propriétaire du fait de l'occupation abusive des lieux par AHEBA depuis le 1er Août 1984, AHEBA qui, est-il rapporté dans les faits de l'espèce, ne paie plus ses loyers depuis Janvier 1980 ; Attendu qu'il y a lieu de faire droit à la demande de ODOULAMY Yaoïtcha et de l'indemniser tant pour son préjudice moral et matériel que pour le manque à gagner qu'il subit du fait de l'impossibilité dans laquelle il se trouve de réviser le prix du loyer de son local ; Q'il y a lieu de fixer ce préjudice à 50.000 Frs forfaitairement ; Par ces motifs : Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort En la Forme : Reçoit comme régulièrement interjeté, l'acte d'appel de ODOULAMY Yaoïtcha, parce que intervenu dans les délais légaux Au Fond : Infirme le jugement du 20 Février 1985 pour mauvaise interprétation des faits Reconnait la validité du contrat passé en 1980 et constate que le bail est arrivé à expiration depuis le 1er Août 1984 Déboute AHEBA Antoine de sa demande de maintien dans les lieux et de dommages-intérêts Ordonne l'expulsion de AHEBA Antoine Le condamne à verser à ODOULAMY la somme de 50.000 Frs à titre de dommages-intérêts Condamne AHEBA Antoine aux entiers dépens Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d'Appel de Cotonou. |